Stage de récupération de points : le guide du résistant
Rédigé par hamlet le 26 avril 2013
Les semaines sont bien rares où aucun courrier frappé de l'effigie de Marianne ne vient faire trembler le citoyen Français. Surtout celui qui ne deale pas de came dans la zone.
Un matin, l'une de ces missives m'annonce qu'il ne reste que trois points sur mon permis de conduire (et accessoirement de travailler).
Réflexe de survie : m'inscrire dans un stage de récupération de point, pour y être dûment "sensibilisé à la sécurité routière" comme, en d'autres lieux et en d'autres époques, les citoyens présentant des divergences idéologiques avec les normes édictées par le régime en place étaient aimablement invités à faire leur autocritique, après une "sensibilisation" identique.
J'exagère ? Evidemment, car la mort n'est plus au bout du chemin. Mais le principe est le même, et il s'agit de manipulation, ce qui n'a rien à voir avec de la sensibilisation. Ici, il s'agit de grosse propagande : présentation d'informations partiales, de statistiques orientées, marketing de la culpabilisation. Rien de moins qu'une tentative de conditionnement du citoyen.
Les citoyens n'ont pas à être "rééduqués" par l'Etat, qui ne présente aucune garantie de moralité. En ce sens, le stage de récupération de point est un excellent exercice anti-totalitaire, pourvu qu'on s'y rende avec un esprit de résistance. C'est ainsi que je suis allé, un lundi matin glauque, au lieu du stage.
Entendons-nous bien, toutefois : il ne s'agit pas ici de contester la loi dans son principe. Il est bon que les vitesses soient limitées. Et il est bon que le port de la ceinture soit obligatoire. Mais la politique ultra-répressive menée à l'encontre des automobilistes n'a aucun rapport ni avec la justice, ni avec la sécurité routière : elle a franchi les frontières de l'honnête, et il ne s'agit plus maintenant que d'un racket fiscal automatisé, tandis que les cambrioleurs, monte-en-l'air, et autres malfrats s'en donnent à coeur joie. Il importe de se défendre de ce racket, au nom des libertés individuelles, mais également d'une conception respectueuse de ce que doit être un Etat. Faute de quoi nous finirons par nous retrouverons un jour en Corée du Nord.
J'exagère ? Evidemment, car la mort n'est plus au bout du chemin. Mais le principe est le même, et il s'agit de manipulation, ce qui n'a rien à voir avec de la sensibilisation. Ici, il s'agit de grosse propagande : présentation d'informations partiales, de statistiques orientées, marketing de la culpabilisation. Rien de moins qu'une tentative de conditionnement du citoyen.
Les citoyens n'ont pas à être "rééduqués" par l'Etat, qui ne présente aucune garantie de moralité. En ce sens, le stage de récupération de point est un excellent exercice anti-totalitaire, pourvu qu'on s'y rende avec un esprit de résistance. C'est ainsi que je suis allé, un lundi matin glauque, au lieu du stage.
Entendons-nous bien, toutefois : il ne s'agit pas ici de contester la loi dans son principe. Il est bon que les vitesses soient limitées. Et il est bon que le port de la ceinture soit obligatoire. Mais la politique ultra-répressive menée à l'encontre des automobilistes n'a aucun rapport ni avec la justice, ni avec la sécurité routière : elle a franchi les frontières de l'honnête, et il ne s'agit plus maintenant que d'un racket fiscal automatisé, tandis que les cambrioleurs, monte-en-l'air, et autres malfrats s'en donnent à coeur joie. Il importe de se défendre de ce racket, au nom des libertés individuelles, mais également d'une conception respectueuse de ce que doit être un Etat. Faute de quoi nous finirons par nous retrouverons un jour en Corée du Nord.
Ambiance
Nous sommes dix huit, de tous âge et de tous milieux culturels, à prendre place dans une salle de réunion, et nous regarder en chiens de faïence. L'ambiance est plombée par l'exaspération d'avoir à subir deux jours pressentis pénibles.
Nous sommes sous l'autorité de deux femmes : Saïda, la trentaine élégante, qui se présente comme une "experte en accidentologie", et Anne-Ségolène, bourgeoise classique, qui est psychologue, et arrive donc avec quinze minutes de retard.
D'emblée, Anne-Ségo met dans l'ambiance : il est strictement interdit de prendre des photos, ou d'enregistrer et de diffuser quoi que ce soit de ce qui va suivre. Curieux, pour un stage de sensibilisation, dont les enseignements se donnent pour but d'éclairer les masses sur la conduite responsable ?
Nous sommes sous l'autorité de deux femmes : Saïda, la trentaine élégante, qui se présente comme une "experte en accidentologie", et Anne-Ségolène, bourgeoise classique, qui est psychologue, et arrive donc avec quinze minutes de retard.
D'emblée, Anne-Ségo met dans l'ambiance : il est strictement interdit de prendre des photos, ou d'enregistrer et de diffuser quoi que ce soit de ce qui va suivre. Curieux, pour un stage de sensibilisation, dont les enseignements se donnent pour but d'éclairer les masses sur la conduite responsable ?
La guerre est sémantique
Chaque mot d'Anne-Ségolène est choisi : elle ne parle que de contrevenants, d'infractions, de délits, car elle ne voit dans la salle que des coupables qu'il lui faut rééduquer. Nous sommes chacun interrogés avec des mots qui sont autant de condamnations : "Quelles infractions avez-vous commises, pour vous retrouver ici ?".
Première règle du résistant : ne pas se laisser culpabiliser. Garder à l'esprit que vous êtes avant tout la victime d'un système massivement répressif.
Seconde règle : ne jamais répondre à une provocation qu'après l'avoir reformulée.
Par exemple, à la question "Quelle infraction avez vous commise ?", répondre, aimablement, quelque chose comme ceci "Pardon madame, sans doute voulez vous savoir pour quelle motif (ou quel prétexte, selon les cas) j'ai été victime d'une verbalisation de la part des forces de l'ordre ?" Car la seule chose certaine, puisqu'il y a présomption d'innocence, c'est que j'ai été victime d'une verbalisation. La qualifier d'infraction, c'est tout à fait une autre histoire.
Vous verrez, ça les calme !
Retourner les chiffres tronqués.
Au cours de ce stage, un certain nombre de chiffres vous seront présentés, de façon partiale. Il suffit de retourner ces armes, elles sont très efficaces.
Et puis, pour faire dans le trivial, chacun sait que s'il s'agissait de sauver des vies, cela ferait belle lurette que l'Etat aurait interdit la vente de tabac, qui fait plus de dix fois plus de morts que la voiture (50.000). Et que s'il s'agissait de respect des limitations de vitesse, cela ferait belle lurette que les vitesses maximum des véhicules seraient asservies à des balises GPS.
Le coût des accidents.
Saïda nous présente une série de chiffres concernant l'accidentologie, le but étant de faire croire que le bilan financier des accidents de voiture est un poids énorme qui pèse sur la collectivité, poids dont vous êtes coupable, puisque vous êtes un conducteur irresponsable, un assasin potentiel.
Ainsi sont alignés les coûts de réparation, de dépannage, d'évacuation, de soin des blessés. Je n'ai pas un souvenir exact du montant de l'addition, mais il peut faire peur, si on ne réfléchit à rien.
Car Saïda n'a aucune idée du nombre d'emplois créés par le secteur automobile (environ 750.000), et par les entreprises sous-traitantes (environ 1,8 millions). Elle n'a aucune idée de ce que rapporte la TIPP (entre 12 et 15 milliards d'euros), ni du chiffre d'affaire des sociétés d'autoroute (entre 8 et 10 milliards).
Et elle ignore aussi qu'en dehors de quelques rares opérations spéciales et spectaculaires (évacuation hélico, par exemple), les coûts des accidents sont pris en charge par les automobilistes eux-même, tous assurés (2.2 milliards d'euros de CA en 2011).
Au final, même s'il y avait dix fois plus d'accidents, l'activité serait encore largement bénéficiaire !
Le rôle des radars
Les responsables du stage vont ensuite vous montrer une jolie courbe, présentant la diminution du taux d'accidents depuis une cinquantaine d'année sur les routes françaises. Et sur cette courbe, ils vont profiter de la présence de quelques variations, graphiquement amplifiées au mieux, pour tenter de prouver que les radars rendent les routes plus sûres.
Cette affirmation est au mieux inexacte, au probable fausse : comment démontrer un item multifactoriel avec une simple courbe ?
Les raisons majeures pour lesquelles les routes sont plus sûres, ce sont l'amélioration des infrastructures, l'amélioration des structures des voitures, le port de la ceinture, et l'invention des airbags. Il est possible que la peur des radars ait joué, au début, mais leur part dans la diminution du taux d'accident est tellement petite qu'elle n'est pas mesurable.
Aucun rapport entre nombre de points et qualité de conduite
Saïda, l'accidentologue, nous présente une fiche d'accident : elle est normalement remplie par les forces de l'ordre, à chaque accident les mettant à contribution. Ces fiches sont extrêmement détaillées : type de véhicule, type de route, inclinaison et état de la chaussée, usure des pneus, alcoolémie du conducteur, couleur de véhicule, et propos tenus par la belle-mère, vraiment tout y est.
Sauf une chose : le nombre de points du conducteurs. Si vous demandez pourquoi, il vous sera répondu que "ce sont des données personnelles", au contraire du taux d'alcoolémie, sans doute.
En l'absence de toute démonstration, le résistant peut affirmer qu'il n'y a strictement aucune preuve du fait que les conducteurs sans points soient plus dangereux que les autres. Ce sont probablement ceux qui roulent le plus, voilà tout.
Les vidéos qui tuent.
Sans qu'il soit possible de dire si elles sont présentées à tous les stages, deux vidéos présentées par les commissaires politiques sont extraordinaires.
L'une est issue d'une caméra de surveillance qui surveille un carrefour sur lequel, bien visible, est placé un panneau de stop. L'action se passe de nuit. On voit une voiture griller le stop. Puis une seconde, puis une troisième, puis une quinzaine de voitures font la même chose (alors qu'il n'y a aucune circulation sur l'axe perpendiculaire).
La réaction attendue par les commissaires politiques est une vive protestation contre le comportement anti-révolutionnaire des conducteurs des véhicules fautifs.
Mais ce ne fut pas la réaction qu'ils récoltèrent : nous avons estimé que le gars des ponts et chaussées qui avait mis là un stop ne pouvait pas être plus intelligent depuis sont bureau que les 15 voitures qui ont bien vu que c'était un cédez le passage, et non pas un stop, qu'il fallait mettre sur ce carrefour.
L'autre est une commence par une question : savez vous comment il est possible de réduire de 50% le nombre d'accidents en ville ? Et la video nous montre un véhicule circulant dans la petite ville de Drachten. La solution de Drachten : supprimer toute la signalisation. « Quand il y a trop de signalisations, les gens perdent tout sens de responsabilité et ils se comportent comme des abrutis, explique Koop. Quand on supprime les panneaux, ils redeviennent responsables ! », (Koop Kerkstra est l'urbaniste qui a eu cette idée). C'est exactement le contraire de ce qu'on fait en France.
Aussitôt, une question est posée à Saïda : et les essais de ce concept génial qu'on a fait en France, ils ont donné quoi ? Mais là, c'est Anne-Ségolène, la psychologue, qui répond : on ne peut pas essayer cela en France, la mentalité n'est pas la même. Si ce n'est pas une belle condamnation a priori, ça !
La victoire en chantant
A la fin du premier jour de stage, l'ambiance était encore passablement studieuse. Là, il faut compter sur les divers profils-type des stagiaires. Il y a le conducteur de Porche, qui expliquera que sa voiture est conçue pour rouler vite, et qu'elle est bien moins dangereuse qu'un tacot à vitesse réglementaire, et que d'ailleurs en Allemagne, il n'y a pas de limitations. Il y a le chauffeur-livreur, ou l'artisan, qui expliquera qu'en faisant tant de kilomètres par an, il est impossible d'être irréprochable tout le temps. Il y a le spécialiste d'autoroutes, qui expliquera que la première cause de mortalité sur autoroute est le sommeil, pas la vitesse. Il y a l'homme de mauvaise foi, qui trouvera toujours d'excellentes raisons de justifier sa conduite. Tous ces profils sont utiles à une chose : fatiguer les commissaires politiques. Il n'est pas besoin de les mettre hors d'elles : soyez ferme, mais courtois, si possible avec de l'humour.
Peu d'enseignants résistent à l'effet conjugué de la fatigue, du refus de culpabilisation a priori, et d'un démontage logique opposé aux arguments les plus spécieux de ceux présentés.
A la fin du premier jour, vous verrez, elles seront bien moins intransigeantes qu'au début du stage. Et l'ambiance entre les stagiaires sera très chaleureuse.
Et normalement le second jour, c'est le club Med !
Anne-Ségo a bien tenté de nous imposer un peu de sérieux dans les jeux d’autocritique qu'elle avait préparé, mais les dernières phases du stage ont été traitées de manière carrément détendue, presque par dessus la jambe. En partant, nous étions des potes !
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